Qu’est-ce que le rayonnement cosmique ?
1/ La radioactivité naturelle

Partout à la surface de la Terre règne un rayonnement ionisant – assez énergétique pour perturber la stabilité électronique des éléments qu’il rencontre. Ce rayonnement est dû à des processus physiques indépendants de l’activité humaine et regroupés dans la catégorie de la radioactivité naturelle. Les caractéristiques de ce rayonnement sont variables selon l’altitude et la nature géologique du lieu mais ses sources principales sont : le gaz radon (présent dans les matériaux de construction des habitations) pour environ 50 %, les roches pour 21 % (désintégration des éléments radioactifs qui constituent notre planète, uranium, thorium et présents notamment dans le granite), les aliments pour 19 %. Enfin, une composante importante (> 10%) de cette radioactivité naturelle au sol provient d’un rayonnement ionisant isotrope – arrivant de toutes les directions de l’espace, sans direction privilégiée – dont le flux augmente avec l’altitude et dont l’origine est extérieure à l’atmosphère terrestre : le rayonnement cosmique.
2/ Les gerbes atmosphériques
Aujourd’hui, nous savons que le rayonnement cosmique est composé de particules chargées : 99 % de noyaux atomiques et 1 % d’électrons. Les noyaux atomiques sont très largement constitués de noyaux d’hydrogène (protons, 89%), des noyaux d’Hélium (particules alpha, 10%), et enfin des noyaux atomiques plus lourds (principalement carbone, oxygène et fer). Lorsque ces particules venues du cosmos pénètrent dans l’atmosphère, elles entrent en collision avec les noyaux atomiques qui la composent (principalement l’azote et l’oxygène). Selon l’énergie du rayon cosmique, cette première collision a lieu entre 40 et 25 km d’altitude. Les produits de cette collision vont à leur tour entrer en collision avec des constituants de l’atmosphère et ainsi de suite pour créer ainsi une cascade de particules qui se développe au cours de la traversée de l’atmosphère : c’est une gerbe atmosphérique. Selon la nature des réactions enclenchées et des particules produites, on distingue 2 ou 3 types de composantes :
– la composante hadronique dans laquelle interviennent des protons, des neutrons, des pions, des kaons ; les désintégrations de ces deux dernières engendrent des muons, des électrons et des neutrinos (regroupés alors au sein de la composante muonique) ;

http://www.in2p3.fr/science_pour_tous/ressources_tout_public/3_expo_conf_posters.htm
– la composante électromagnétique dans laquelle interviennent des électrons et des photons gamma.

Au cours de son développement, une gerbe atmosphérique engendre des milliards de particules réparties sur une surface qui peut atteindre plusieurs km² au sol (profil latéral) ; certaines d’entre elles n’ont pas assez d’énergie pour atteindre le sol, d’autres ont des durées de vie trop courtes et se désintègrent en d’autres particules. Ainsi, au niveau de la mer, on dénombre environ 300 particules/m²/s. Ces particules sont des muons (63%), des neutrons (21%), des électrons (15%) et dans une faible proportion (<1%) des protons et des pions.
Les muons interagissent très peu avec la matière. Ce sont donc les particules majoritaires au niveau du sol, c’est pourquoi ce sont celles que l’on va chercher à détecter pour remonter à l’information sur le rayonnement cosmique (énergie, direction, nature de la particule primaire). Un muon est le cousin massif d’un électron : c’est une particule dont la charge possède la même valeur que celle de l’électron et dont la masse est environ 200 fois celle de l’électron. La plupart des muons qui parviennent au sol sont produits à une quinzaine de km d’altitude.
Le spectre du rayonnement cosmique

La répartition du flux du rayonnement cosmique primaire en fonction de son énergie (son spectre) est caractéristique. Le flux varie de 32 ordres de grandeur (de 10-28 à 104 particules.m-2.sr-1.s-1.Gev-1) depuis un nombre très important de particules aux basses énergies (plusieurs centaines de particules par m² par s) à un nombre très rare d’événements aux ultra hautes énergies (1 particule par km² par siècle). Les énergies sont comprises entre 10⁸ eV et 1020 eV, soit l’énergie d’une balle de tennis lors d’un service à 150 km/h. Les origines du rayonnement cosmique constituent une thématique de recherche toujours d’actualité et son spectre ainsi que sa composition donnent de nombreux indices sur son origine, en particulier en fonction de l’énergie considérée : pour les basses énergies (<10⁹ eV), la source principale est le Soleil et ce flux est lui-même modulé par le vent solaire (haut de la courbe) ; pour les énergies comprises entre 10⁹ eV et 1018 eV, les sources sont d’origine galactique, principalement des supernovae (explosion d’étoiles en fin de vie) jusqu’à 1015 eV ; au-delà de 1018 eV, les sources sont principalement d’origine extragalactique et les candidats sont associés aux événements les plus violents de l’Univers (noyaux actifs de galaxies, sursauts gamma, trous noirs, pulsars).
La découverte de ce rayonnement ionisant puis la quête de la caractérisation de sa nature ont largement contribué aux développements de la physique au XXe siècle, que ce soit par les avancées en physique subatomique avec la découverte de nombreuses nouvelles particules, ou bien par le développement de nouvelles techniques d’instrumentation adaptées à ces énergies. Plusieurs prix Nobel ont été attribués à des spécialistes de ce domaine. Après avoir suscité l’émergence de la physique des particules, la thématique des rayons cosmiques est aujourd’hui un des moteurs d’un nouveau champ de recherche : la physique des astroparticules.